Les Chroniques de :  Jacques Le Meur

1962 le "Paris-Bretagne"

En France, les années 60 sont marquées par une montée de la technicité, avec le développement du chalutage par l'arrière symbolisé par la construction du "Paris-Bretagne". Celui-ci ne fut pas formellement le premier navire de ce type, puisque la technique avait déjà cours chez des morutiers et s'était développée, dès la fin des années 50 dans plusieurs flotilles du nord de l'Europe. Malgré tout, ce lancement fut un véritable événement industriel.

Le bateau fut construit à Lorient aux chantiers de La Perrière. Long de 36,50 m, avec sa passerelle à l'avant, il mettait en oeuvre son chalut par l'arrière à partir d'un portique oscillant, cette dernière particularité facilitant l'embarquement de la poche de poisson. L'ancienne pêche par le côté reposait surtout sur le travail manuel et exposait les marins aux éléments. En pêche arrière, les marins étaient davantage protégés, avec une fatigue moindre grâce à une forte mécanisation. 

 

Des ajustements techniques

Le chalutier démarra ses essais en mars 1962 au large de Groix, sous la conduite du patron Léon Le Rohellec, ce qui mit en évidence plusieurs problèmes techniques: frottements des treuils et des panneaux, balancement du cul de chalut, difficultés de manoeuvre par grand vent, mauvaise position de l'ouverture de la cale à poisson (au ras du pont, ce qui faisait embarquer de l'eau). En situation de pêche, le portique était trop incliné vers l'arrière, ce qui gênait les manoeuvres et provoquait une dérive en cas de grand vent. Le chantier dut alors réaliser plusieurs ajustements qui furent ensuite repris sur le deuxième de la série "Anjou-Bretagne". Le troisième bénéficia de plusieurs changements impulsés par l'architecte naval Dominique Paulet. Lancé en 1965, le "Cézembre" présentait des différences qui prenaient en compte l'expérience des deux premières unités. La passerelle fut placée à l'arrière et la cale à l'avant. La carène fut améliorée tandis que le portique était désormais droit et fixe.

Des rampes arrières

Par la suite, la flotte hauturière se renouvela totalement en pêche arrière. Sur certains navires, le pavois arrière était fermé et la poche devait être hissée. Sur d'autres, notamment les grands navires industriels, l'arrière était ouvert par une rampe par où le chalut était filé (mis à l'eau) et viré (remonté). Une fois les opérations achevées, la rampe était fermée par une porte pour limiter l'embarquement de paquets de mer. Le travail par l'arrière présente un risque permanent: en cas de croche du chalut sur des éléments du fond (roches, épaves), le bateau peut se cabrer et embarquer de grandes masses d'eau. Ce risque impose une grande responsabilité dans la conduite du travail de la pêche. Aujourd'hui, le chalutage présente l'inconvénient d'exiger de grandes dépenses d'énergie, ce qui incite de nombreux armateurs à rechercher des techniques plus économes comme la senne.

extrait de Lanriec.com

à retrouver dans les archives iconographiques du musée une gouache d'Hervé Gloux datée de 1957, un projet de pêche-arrière déjà avant-gardiste.