Les Chroniques de :  Jacques Le Meur

Concarneau : de La Croix au Moros, un siècle pour occuper l'espace portuaire

L’histoire du port de Concarneau depuis un siècle est celle de la conquête progressive des espaces d’un estuaire, processus qui a atteint son terme. La sentinelle de Concarneau était depuis 1895, à l’entrée du port, le laboratoire de biologie marine et les viviers contigus. Le cœur du port à la fin du XIXe siècle était tout proche : c’est au quartier de La Croix qu’avaient été installée la criée municipale et aménagé un bassin portuaire. Les conserveries étant presque toutes implantées sur le front de mer, l’endroit était idéal pour livrer directement le poisson. A cette époque, existent déjà les quais de l’Aiguillon et Carnot, port embryonnaire se prêtant au trafic des engrais et à l’expédition de poisson frais par chemin de fer vers Rosporden. Le remblaiement de l’anse du Lin permet en 1908 de réaliser un raccordement avec la ligne de Quimperlé. Les ouvrages n’autorisent l’accostage que de 300 bateaux alors que le port en reçoit jusqu’à 2 000. En 1904, le gouvernement refuse un projet d’aménagement à cause du classement de la Ville Close.

Photo 2004

Autour de la Ville Close

Ensuite, le port se recentre sur le bassin délimité au nord par la Ville Close et au sud par le môle du laboratoire, c'est-à-dire l’espace actuel du port de plaisance, qui donnait sur un port d’échouage d’un hectare, le bassin Pénéroff (qui sera comblé en 1937). Au début des années 30, cette configuration est toujours en vigueur. Le nord de la Ville Close, n’est pas encore un vrai port et le chenal du Passage n’est pas aménagé, ce qui limite la fréquentation. Plusieurs grands chantiers sont réalisés entre 1930 et 1939 : la refonte des quais Carnot et de l’Aiguillon, l’achèvement du remblaiement de l’anse du Lin, la construction du quai du Lin, le déroctage et le balisage du chenal du Passage, la construction d’un quai, d’une cale et d’un terre-plein au Roudouic. Le quai Carnot peut recevoir les glacières Courtois et la nouvelle criée, qui est reliée directement au fer. En une décennie, la partie utile du plan d’eau portuaire a triplé, sur la base d’une production de seulement 7 500 tonnes de poisson et de quelques milliers de tonnes de fret.

 

Le quai Est

Lancée en 1936, la construction du terre-plein du quai Est demandera dix ans, en raison de l’interruption de la guerre. Les investissements se multiplient avec l’extension des bâtiments de la criée, la construction du slipway, le creusement du bassin du Moros, dans les années 60, et l’installation d’un élévateur à bateaux de 2 000 tonnes en 1978. La modernisation du port marque ensuite le pas jusqu’au début des années 90. En 1991, la criée est modernisée, avec l’isolation de son espace de vente et l’élargissement du quai principal sur une longueur de 250 mètres. Suivent le lotissement de 6 magasins de marée sur l’ex-anse du Lin, la gare de marée et la zone industrielle du Roudouic. Le dernier grand chantier concarnois sera la cale sèche de 130 mètres, ouverte en 2002 et qui se traduit par une « reconquête » d’espace dans l’amont de l’estuaire du Moros. L’avant-port est occupé par la plaisance qui, à partir de 1976, a bénéficié d’un véritable port avec des pontons. Le nord de la Ville Close est affecté aux pêcheurs côtiers et la rive gauche du Moros aux chantiers navals. Désormais, toute la réserve d’espace portuaire a été consommée. Il reste à donner une vocation technique à la zone située entre le Passage et l’élévateur. Après la réduction de la flotte chalutière des années 2000, la longueur de quai affectée à la pêche devient disproportionnée. Un reflux qui a libéré une place importante sur le plan d'eau et les terre-pleins, en attente d'affectation.

Photo 2004

 

La Navale, vitrine industrielle

Pendant tout le siècle dernier, la construction navale a accompagné l’évolution des pêcheurs. Avant-guerre, ce furent les chantiers Donnart, Lancien-Goanvic (devenu Scen), Krebs, actifs jusqu’aux années 60. Le métier se renouvela ensuite avec la création des chantiers Vergoz en 1957 et Piriou en 1965, ce dernier reprenant le précédent en 1996. Aujourd’hui, avec Piriou et JFA, spécialiste des yachts de luxe, tous deux implantés rive gauche, la Navale, en construction et en réparation est l’industrie la plus visible du port.

Jacques Le Meu